Sexe, drague et Temesta
J’avais connu Raphaëlle en la voyant lire sur la scène d'un petit théâtre un texte déjanté, un horoscope louftingue pétri d’auto-dérision qui
m’avait rendu amoureux d'elle aussi sûrement qu'une comète tombe sur le petit peuple de l’an mille. Nous
avions quelque chose comme dix-huit ans de différence d'âge, et pourtant je lui avais
expliqué que nous allions être amants, que c’était une fatalité inscrite dans les astres, une évidence. Evidemment, elle ne m’avait pas cru...
Enfin, pas tout de
suite.
J’avais persévéré, ce qui ne me ressemblait guère. Il faut savoir, pour comprendre mon
insistance, que cette fille était une des plus jolies qu’il m’avait été
donné de connaître. Un double de Marie Trintignant en plus
jeune, plus belle… et beaucoup moins morte. Une fille qui irradiait une folie juvénile à laquelle l'homme que j'étais ne pouvait que succomber, dotée de surcroît de la plus belle bouche
que la nature ait pu créer. Charnue. Brillante. Un fruit frais gorgé
de jus.
Un soir, alors que j'avais presque désespéré d'arriver à mes fins, son nom apparut sur ma messagerie et après quelques minutes de discussion elle me demanda si je
voulais la rejoindre, chez elle... J'aurais dû hululer de joie devant mon écran, mais hélas, cent fois hélas, nous étions dimanche et
comme tous les dimanche soir j’avais pris, quelques minutes auparavant, un somnifère.
Je maudis les dieux Chrétiens, Grecs, Romains, Turcs, Tadjiks et Moldo-Valaques de ma déveine ! Effondré, je lui dis que j’étais fatigué. Mais elle insista, et elle ajouta même qu’elle ne
voulait pas être raisonnable...
Je m’habillai, sautai dans la voiture et traversai
Paris d'une traite, en essayant de ne pas trop zigzaguer.
Elle me fit entrer chez elle, elle était belle à réveiller un
saint !… Ce sourire ! Ces lèvres !! Nous discutâmes un peu sur son
canapé, effleurant comme par accident nos mains, nos pieds. Puis vers une heure du matin elle me demanda si je voulais dormir avec elle. Nous
passâmes au lit, sa couette blanche, ses gros oreillers gonflés, sa
peau blanche, mes gros yeux gonflés...
Je l’embrassai sur la tempe,
frôlant ses épaules délicates avec l'air de ne pas y toucher et lui souhaitai bonne nuit. Quelques minutes plus tard elle étira lascivement un pied mutin vers ma cuisse… qui ne rencontra que l'indifférence absolue d'un corps dormant déjà d'un sommeil de plomb : le mien !
Au matin, après avoir fait ma nuit d'une traite, je ne pus que constater qu'elle était partie en laissant un post-it me disant juste de claquer la porte en sortant.
Evidemment, je ne reçus jamais de seconde invitation.
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